De l’utilité de la douceur dans la fermeté pour une bonne éducation des enfants

Il est important de décrire un élément essentiel du développement psychoaffectif de l’enfant, sur lequel il n’est généralement pas suffisamment insisté. Il s’agit de l’intrication des pulsions agressives et des pulsions libidinales (pulsions de vie, d’amour).

Le Dr Fabrice LOMBARD est chef de service des hôpitaux en psychiatrie enfant. Il est psychanalyste Jungien et anime les formations en Psychopathologie à LA TEMPERANCE.

Bibliographie

- ABC de la Psychologie Jungienne, Carole SEDILLOT, Ed. Jacques GRANCHER 2003.
- ABC de la Psychologie de l’enfant, Corinne MOREL, Ed. Jacques GRANCHER 2000.
- ABC de la Psychologie et de la Psychanalyse, Corinne MOREL, Ed. Jacques GRANCHER 1995.

Il est important de décrire un élément essentiel du développement psychoaffectif de l’enfant, sur lequel il n’est généralement pas suffisamment insisté. Il s’agit de l’intrication des pulsions agressives et des pulsions libidinales (pulsions de vie, d’amour).

Un courant d’eau bleu turquoise

Plus qu’une intrication, on peut dire qu’il y a, à l’origine, une indifférenciation de ces deux types de pulsions. Pour expliciter ceci, on peut imaginer un courant d’eau turquoise qui se diviserait, environ vers l’âge de sept mois en deux bras : l’un vert devenant de plus en plus vert et de moins en moins bleu, et l’autre bleu devenant de plus en plus bleu et de moins en moins vert au fil du temps. Ils seront totalement contrastés l’un et l’autre vers l’âge de quatre ans.

Prenons un exemple

Ainsi lorsqu’un bébé tête le sein de sa mère, il met en jeu ses pulsions primordiales où s’expriment à la fois un échange affectif intense et une agressivité destructrice de dévoration, d’incorporation du sein de la mère. Plus tard, vers douze ou quinze mois, les pulsions sont assez différenciées : pour apprendre à parler, à marcher, l’enfant est obligé de faire appel à ses pulsions agressives (dans une moindre mesure intervient aussi le reste des pulsions libidinales encore dans le flux des pulsions agressives. Par exemple, l’enfant se dirige aussi vers sa mère parce qu’il l’aime et qu’il a envie de la rejoindre). On découvre donc dans cette agressivité fondamentale qui est la notre, un aspect positif indispensable à notre développement psychoaffectif, à notre personnalisation et à notre survie. Mais il existe aussi l’aspect négatif des pulsions agressives : une violence innée que l’être bien guidé et réfléchi essaiera de canaliser ou de sublimer, évitant ainsi le piège de l’expressivité irrationnelle et malsaine de la haine dirigée contre autrui ou retournée contre soi (source de beaucoup de dépressions ou de névroses).

L’art simple et subtil d’élever un enfant

La gestion des pulsions libidinales de l’enfant est simple : il suffit que ses parents l’aiment pour revigorer, pour favoriser l’épanouissement des pulsions d’amour, nourrir son narcissisme (une bonne image de lui-même) ; car l’enfant qui s’aime lui-même aimera les autres. La gestion des pulsions agressives est par contre beaucoup plus subtile : Ici l’éducation devient un art plus complexe avec des risques d’erreurs et possibilités d’incidences graves entravant une construction harmonieuse de la personnalité. Le schéma optimal est une autorité qui doit s’imposer (dans tous les textes religieux cette notion est mentionnée et représentée) fermement afin de colmater l’émergence spontanée des pulsions agressives dans leurs composantes négatives, mais sans bloquer les composantes positives utiles.

Voyons comment

Par exemple, quand un père et une mère disent “NON”, ils doivent être détendus, sûrs d’eux-mêmes, ne pas changer d’avis quelle que soit la frustration de l’enfant et lui exprimer que quand ils le répriment c’est parce qu’ils l’aiment et qu’ils veulent qu’il reste “l’enfant gentil qu’il est et qu’il est bien tel qu’ils l’ont toujours souhaité” (il est important pour les enfants d’entendre de tels propos tenus par leurs parents, cela les aide à s’accepter !). Si cela est nécessaire, une voix forte, une petite tape sur les fesses, mais jamais de claques, de bousculades irrespectueuses ou de gestes méprisants pour lui. Voyons pourquoi en étudiant quelques erreurs.

Erreur de comportement N°1

Une autorité froidement, durement imposée sans une chaude affection ambiante aura bien pour effet de colmater les pulsions agressives négatives mais elle entravera aussi l’expression positive : cela pourra engendrer un retard de la parole, de la marche et un retournement de l’agressivité de l’enfant contre lui-même, avec le risque d’exacerbation des conflits intrapsychiques.

Erreur de comportement N°2

Une absence d’autorité, d’interdiction, de remise en place vont flatter une tendance naturelle (et universelle) de l’enfant à l’égocentrisme, à la mégalomanie (aspect qui sera décrit plus longuement dans un article ultérieur), un manque de perception de l’autre comme personne existante avec sa propre sensibilité, ses désirs et exigences, sa fragilité et sa vulnérabilité. Ce comportement altérera le niveau de sociabilité et d’humanisation de l’enfant.

Que faire ?

Les parents d’un enfant de moins de sept ans doivent montrer souvent et avec beaucoup d’expressivité toute la joie et le plaisir que leur procure l’enfant dans ses réussites, son obéissance, dans ses attitudes altruistes et de respect des autres. Ils lui donnent ainsi des “ancrages” positifs -dirait-on en P.N.L. (Ces principes sont bien évidemment valables pour toutes les personnes qui exercent une autorité sur des enfants.) Par contre, les parents doivent le plus souvent (ce qui n’est pas toujours facile !) s’abstenir de montrer leurs pleurs, leurs agacements, leur fatigue, leurs peurs, et leurs émotions négatives à l’égard de leurs enfants. Ceux-ci ont besoin d’une image rassurante pour acquérir une sécurité intérieure. Des paroles telles que “tu m’énerves”, “tu m’agaces”, “tu me fatigues...” nuisent à la crédibilité de cette représentation dans l’imaginaire de l’enfant. Quand les parents grondent, interdisent ou mettent des limites, ils doivent le faire sur un ton calme, serein, dénué de tout affect psychotoxique et paraître comme du “marbre chaud”.

Que peut nous apprendre encore la loi fondamentale de l’intrication de ces pulsions

La connaissance de cette loi est très utile en thérapie : elle explique certains problèmes rencontrés dans le développement des enfants et en favorise la guérison. Reprenons l’exemple du retard de la parole : un enfant de quatre ans qui ne parle pas, du fait du blocage des pulsions agressives prononcera ses premiers mots choisis sur le registre violent, chargés d’affect agressif : “con”, “salaud”, etc, ou indiquant un mouvement “avion, camion...” avant même de dire “papa”, “maman”. Agressivité et sexualité : quelques exemples significatifs. Un premier exemple des conséquences possibles de l’agressivité mal gérée chez l’enfant de deux à quatre ans : une autorité trop forte, trop strictement imposée, notamment pour l’éducation de la propreté enkystera trop de pulsions agressives dans les pulsions libidinales (désintrication incomplète) : d’où réémergence dans la sexualité -qui met en jeu les pulsions libidinales- de ces artefacts agressifs, sadiques demeurés dans le courant de pulsions d’amour dont la pleine illustration est représentée par le sadomasochisme ou par le proverbe populaire “l’amour est proche de la haine !”

L’Empire des sens

Une autre illustration de cette idée (notre analyse du film est ici volontairement réductrice, il y aurait beaucoup d’autres choses à dire...) est bien expliquée dans le film “L’Empire des sens” où l’on voit un couple dont l’amour devient de plus en plus fusionnel. Leur passion charnelle active la remontée vers les pulsions primordiales avec la redécouverte de ce courant indifférencié originel tant agressif que libidinal ; l’agressivité originelle étant remobilisée au point que l’amante assassine par amour l’aimé...

La culpabilisation de la sexualité

Elle avive aussi les composantes négatives de l’agressivité incluses initialement dans ces pulsions libidinales avec risque d’augmentation, d’une part de l’angoisse névrotique et (ou), d’autre part du sentiment d’insatisfaction induisant des fantasmes sexuels exacerbés, des comportements dominateurs.

Le tantrisme indien

La civilisation hindoue, qui, à l’inverse, dans le tantrisme indien, présente la sexualité comme sacrée, belle en soi, comme une première marche indispensable vers la spiritualité à condition que le désir soit perçu et vécu comme une prière, une offrande, un échange spirituel avec l’Autre, n’avait eu aucune tendance expansionniste ou colonialiste (nous en reparlerons plus longuement dans un prochain numéro).

Que penser ?

Il nous faut garder à l’esprit cette loi du fondement de notre nature humaine afin de nous préserver de nos propres excès dans la passion, la haine et la culpabilisation. Il nous faut également regarder l’agressivité de l’enfant comme une composante naturelle de son développement et donc en accepter ses diverses expressions. Il suffit de permettre aux enfants de la canaliser vers des activités ludiques et créatives : à travers le jeu, le sport, la peinture, le dessin ou toute autre forme d’expression, en leur donnant un cadre et des règles transmises avec fermeté et douceur. Seuls les comportements agressifs démesurés (morsures, crachats...), ou dirigés contre les images d’autorité sont le signe d’une pathologie sous-jacente -légère ou non-, qui nécessite une consultation médico-psychologique. Dans le prochain numéro, nous reparlerons d’une autre loi fondamentale du développement psychoaffectif de l’enfant, notamment en revenant sur la notion de mégalomanie et d’omnipotence du bébé...

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